Suivez-nous

Agence Référence

Au Cœur de l'Actu

Interview : Géraud Delvolvé réagit sur la commission de contrôle

par Au Cœur de l'Immo, le

Géraud Delvolvé, délégué général de l’Union des syndicats de l’immobilier

- INTERVIEW EXCLUSIVE -

La rédaction d’aucoeurdelimmo.com a eu le plaisir d’interviewer Mr Géraud Delvolvé de l’UNIS, sur le projet de loi « Egalité et Citoyenneté » et, plus particulièrement, la commission de contrôle. Le projet de loi a été déposé devant l’Assemblée Nationale et les consultations sont ouvertes jusqu’à la fin du mois de mai.

null

Aucoeurdelimmo.com – La Loi ALUR prévoit, entre autre, la création d’une commission de contrôle des activités des professions immobilières. En quoi consiste cette dernière ?

Géraud Delvolvé - La commission de contrôle des activités des professions immobilières est une commission de discipline. Elle s’inscrit dans un contexte global de restructuration des métiers de l’immobilier. Le volet de la loi ALUR la concernant compte d’autres mesures telles que la réduction de la durée de la carte professionnelle de 10 à 3 ans, l’obligation de formation continue depuis avril, l’adoption par décret d’un code de déontologie de la profession et la création du Conseil National de la Transaction et de la Gestion Immobilières. C’est donc l’ensemble qu’il faut considérer comme réforme de la profession immobilière.

Tous ces points ont été demandés par les professionnels de l’immobilier, dont l’UNIS, en 2011 dans un livre blanc présenté à Mme DUFLOT, ministre du logement de 2012 à 2014. Les propositions faites dans ce dernier ont trouvé un écho favorable dans la loi ALUR.

Dans cette dernière, un article général prévoit la précision par un décret de la commission de contrôle. Elle serait composée de magistrats, de personnalités juridiques qualifiées dans le domaine immobilier et d’associations de consommateurs. Elle aurait la capacité, en dernier recours, de prononcer des sanctions, tels que le blâme, l’avertissement, l’exclusion temporaire ou définitive, à des professionnels mal intentionnés.

 

 

Aucoeurdelimmo.com – Pour vous, cette commission de contrôle est-elle indispensable ? Quel est son objectif ?

Géraud Delvolvé - C’est une institution importante qui concernera l’ensemble des professionnels, qu’ils soient affiliés ou non à un syndicat. Aujourd’hui, l’UNIS et les autres fédérations ont déjà un code de déontologie. On fait donc régner notre discipline en excluant, tous les ans, un ou deux membres mal intentionnés qui ne la respectent pas. Cependant, l’impact peut-être faible car le professionnel exclu va continuer à exercer.

L’objectif de cette commission est donc la montée en gamme des services immobiliers pour répondre aux enjeux de rénovation du patrimoine, d’accès au logement et de révolution numérique. Il faut accompagner les professionnels pour améliorer la fluidité du marché et la valorisation du patrimoine.

Dans un contexte hyperconcurrentiel, les professionnels de bonne foi ne doivent plus être défavorisés par rapport aux professionnels qui violent la loi. Le consommateur ne peut pas se satisfaire d’être face à un professionnel laxiste ou indélicat. Notre secteur est régulé par de nombreuses lois et règles déontologiques. Un spécialiste n’est pas à l’abri d’un oubli. Il doit être accompagné pour que chaque processus soit respecté. L’exclusion temporaire ou définitive doit être décidé en dernier recours.

 

 

Aucoeurdelimmo.com – Quel est l’avis de l’UNIS concernant cette commission ?

Géraud Delvolvé - La loi ALUR comprenait des sujets qui ne nous convenaient pas. Nous étions d’accords sur le principe mais pas sur le détail. Notre désaccord concernait trois volets : la composition, le fonctionnement et le financement.

Premièrement, la loi ALUR prévoyait une commission sans professionnel de l’immobilier en activité. Comment une commission composée en exclusivité de personnes non-professionnelles pourrait prononcer des sanctions ? Dans le projet de loi « Egalité et Citoyenneté », il y a un article qui habilite le gouvernement à prendre une ordonnance sur la commission de contrôle. Je cite, « le gouvernement est habilité, sur la commission de contrôle, à préciser la composition, le fonctionnement et le financement ». Nous avons été surpris de ne pas être informé de cet article et de le découvrir par hasard… L’UNIS et le CNTGI n’ont pas été consultés, alors que ce dernier devrait être impérativement sollicité pour tous les textes qui réforment, d’une manière ou d’une autre, la commission.

Deuxièmement, il est hors de question que des milliers d’entreprises de l’immobilier soient saisies régulièrement par des millions de clients qui auraient quelque chose à dire. Il est nécessaire de mettre un filtre pour définir ce qui relève de cette commission de contrôle. Pour nous, son rôle n’est pas de régler les conflits de voisinage, d’honoraire ou d’affectation des comptes, mais de manquement sérieux aux règles déontologiques. On souhaiterait que le conseil puisse prononcer un avertissement, un blâme ou une exclusion, après sanction de la justice. Que cette dernière agisse donc comme un filtre.

Troisièmement, le financement appuie un objectif, un volume attendu prévisible de saisines. Le nombre de saisines agit donc sur les besoins en financement de la commission. Aujourd’hui, l’étude d’impact du projet de loi « Egalité et Citoyenneté » qui soutient l’article sur l’ordonnance, prévoit 800 plaintes par an et un besoin en financement de 375 000 € par an. Cette étude indique que ce sont les professionnels qui vont financer ce fonctionnement. Mais nous n’avons pas été consultés. Sans discussion, inscrit brutalement dans une loi ou une ordonnance, ce financement par les professionnels s’apparente à une taxation d’office. Ce financement pourrait également se faire sous la forme d’une cotisation, telle que la carte payante délivrée par la Chambre de Commerce. Mais nous considérons que ce n’est pas le rôle de cette dernière.

 

Aucoeurdelimmo.com – Quelles actions sont menées par l’UNIS face à ce projet de loi ?

Géraud Delvolvé - Les professionnels sont très choqués par la méthode employée qui n’est pas respectable. Nous sommes d’accords pour jouer le jeu de la concertation et de la négociation mais on ne veut pas le faire par défaut.

L’UNIS va donc, dans un premier temps, saisir à nouveau le CNTGI. En parallèle, nous avons un rendez-vous avec la ministre du logement, Emmanuelle Cosse, la semaine prochaine. Le rendez-vous risque donc de beaucoup porter sur ce point. Ensuite, nous demandons un rendez-vous à la chancellerie. En effet, la commission de contrôle étant semi-ordinale, il est possible qu’elle soit contrôlée par cette dernière. Enfin nous allons mettre à profit toute la période de consultation, ouverte jusqu’à fin mai, pour sensibiliser les membres de la commission spéciale chargée d’examiner le projet de loi « Egalité et Citoyenneté » au sein de l’Assemblée Nationale.

Le débat est occulté par le sujet sur le logement social qui concerne 99% du projet, mais les mesures annexes sont découvertes seulement après publication. On souhaite que l’article sur la commission de contrôle fasse l’objet d’un traitement particulier.

La loi ALUR nous a fait avancer d’un pas sur notre structuration et notre honorabilité et la méthode utilisée pour l’ordonnance nous fait reculer de deux pas.

 

Propos recueillis par Emilie Franconi.

 

Consultez des articles similaires