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Politique du logement : quelle est la (vraie) place de l'Etat ?

par Au Cœur de l'Immo, le

Sylvia Pinel, ministre du Logement, et Jean-François Buet, président de la Fédération nationale de l'immobilier (FNAIM), lors de la remise des insignes de Chevalier de la Légion d’honneur.

"L'endroit où il fallait être mercredi dernier était sans doute la remise de la Légion d'honneur par la ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité au président de la FNAIM. L'essentiel de ce qui compte dans l'univers immobilier était là, et moi aussi. Il ne s'agissait pas seulement en outre d'un événement parisien puisque le récipiendaire avait convié l'ensemble des responsables de Chambres territoriales de son organisation fédérale. L'échange discours était de bonne tenue : la ministre a reconnu les mérites d'un homme qui pèse sur la décision publique et le fait de façon compétente et responsable, et le patron de syndicat patronal a salué l'action de Sylvia Pinel, pragmatique et respectueuse des attentes professionnelles.

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Les deux regards sont fondés. C'est un mot de Jean-François Buet qui m'a accroché l'oreille et sur lequel je veux revenir : le président de la FNAIM a qualifié le ministère du logement de régalien. Stricto sensu, le qualificatif est utilisé abusivement : un domaine régalien est un domaine dans lequel l'Etat ne peut ni abandonner ni partager l'action. La justice, la défense, les affaires étrangères, l'intérieur et les finances sont les ministères régaliens. Que voulait dire le nouveau chevalier ? Que le logement était un ministère majeur, et les ministères régaliens, dans l'organigramme gouvernemental, viennent en tête. Les moyens qui leur sont alloués sont plus importants, en conseillers, en administration. Leur poids dans les arbitrages budgétaires est évidemment plus marqué, et leur influence est a priori plus grande. En clair, le mot avait été choisi pour décrire les enjeux : oui, les enjeux du logement et de l'aménagement du territoire sont considérables.

Pour le reste, la communauté professionnelle comme les ménages doivent se réjouir que le ministère du logement... ne soit pas régalien, c'est-à-dire qu'il ne soit pas en situation de ne rien déléguer aux autres acteurs. Finalement, n'est-on pas sans cesse en train de reprocher à l'Etat en France de trop administrer le secteur et de le paralyser ? Cécile Duflot n'aspirait pas à faire du logement un espace régalien, mais elle aura été très interventionniste. Il me semble qu'il y avait des raisons parce que certains dérèglements appelaient de la régulation, mais même l'utilité et la pertinence de sa pente à réguler font l'objet de discussions à l'infini. Au demeurant, le ministère de la justice, en charge de la règlementation des agents immobiliers et des administrateurs de biens comme de la loi sur la copropriété ou de celle relative aux rapports locatifs a toujours semblé pesant aux professionnels. En somme, sa tentation d'être régalien dans ce domaine comme il l'est pour la justice a souvent été critiquée.

 

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Mais derrière le choix des mots du président de la FNAIM, il y a autre chose : l'hésitation de tous, les ménages en tête, à vouloir deux choses contradictoires. Au fond, nous invoquons par réflexe l'Etat, ou les collectivités territoriales, à chaque fois que nous rencontrons un problème et nous avons parfois raison, souvent tort. Tort désormais quand nous attendons des aides financières...mais raison quand nous voulons que soient levés les freins et allégées les containtes fiscales. Tort quand nous pouvons régler les choses par le contrat entre les parties ou les engagements internes à une profession, et que nous allons tirer la manche du législateur. Raison quand les normes se multiplient, qu'une RT 2018 menace alors que la RT 2012 n'est même pas encore digérée par tous les constructeurs.

La vraie question est bien celle de la place de l'Etat. Il en occupe trop et en aucun cas il ne faudrait qu'il en occupe davantage. Un sujet cher au président de la FNAIM l'illustre : il appelle légitimement de ses vœux que le parc locatif privé relaie les parc HLM pour loger les ménages à revenus faibles voire intermédiaire, au prix d'une considération fiscale en contrepartie d'une modération des loyers. Tout est dit : un partage de souveraineté et non un Etat omniprésent, qui croit pouvoir tout faire lui-même... avec l'argent de ses sujets néanmoins.

Comme quoi, derrière un mot, peut se cacher une question fondamentale. A Madame Pinel, par courtoisie politique et parce qu'elle est une femme pleine de charme, on concèderait volontiers un titre de reine. A la ministre, qui aura contribué un peu à simplifier et à déréguler, et à ses successeurs, qui devront le faire encore et encore après elle, il est de moins en moins question de bâtir un trône. Que Dieu nous garde d'un ministère du logement régalien. En revanche, et c'était le propos de Jean-François Buet, il n'est que temps que le logement mobilise davantage l'intérêt des décideurs publics et qu'ils en fassent effectivement une cause nationale.

 

Henry Buzy-Cazaux,

Président de l'Institut du Management des Services Immobiliers"

 

Source: capital.fr

 

 

 

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