Rapports locatifs, vraies avancées du nouveau contrat de bail type
par Au Cœur de l'Immo, le
Au rang des dispositions de la loi ALUR dont le public attendait l'entrée en vigueur avec impatience, le contrat type de bail d'habitation. Le décret du 29 mai dernier vient de nous fournir cet outil, utile aux propriétaires et aux locataires, comme aux agents immobiliers et aux administrateurs de biens mandataires. Le délai d'une année entre la promulgation de la loi et la publication de ce décret d'application n'est pas le fruit d'un retard imputable au gouvernement : la consultation de deux instances constituait un préalable à toute signature ministérielle.
En effet, le Conseil national de la transaction et de la gestion, créé par la loi du 24 mars 2014 pour éclairer le gouvernement sur tous les sujets de sa compétence, notamment en vue de l'application de la loi ALUR même, et la Commission nationale de concertation, chargée des questions de rapports locatifs, devaient rendre leur avis. Ce fut fait.
En pratique, plus qu'un contrat type, le nouveau bail est une trame, qui laisse place à l'adaptation par les rédacteurs et par les signataires. Par exemple pour la durée du contrat, le document précise une alternative entre une année minimale pour la location à tout preneur et neuf mois pour un étudiant. Il en va ainsi de la plupart des stipulations, qui devront être intelligemment choisies par les parties au contrat ou par le professionnel qui les rapproche.
Quelles sont les vertus de ce décret ? Elles sont multiples. D'abord, précisément, il n'a pas été voulu comme un carcan, mais comme un guide permettant de ne rien oublier d'essentiel et de ne rien rajouter de superfétatoire. La place est laissée à l'appréciation de la spécificité de chaque relation locative, du fait du bien loué et de ses particularités techniques, du profil du preneur ou encore de la présence d'un mandataire dans la relation locative. Pour les professionnels, qui craignaient que leur valeur ajoutée disparaisse avec la normalisation, le choix du pouvoir règlementaire est heureux. Il est surtout conforme à la complexité des situations.
Parmi les professionnels que le décret met en avant indirectement, il y a aussi les diagnostiqueurs : le décret rappelle opportunément la liste des expertises techniques désormais indispensable.
Pourtant, la véritable utilité de ce décret est ailleurs : il va sans doute éradiquer les clauses abusives ou illicites, régulièrement montrées du doigt par la direction de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes lorsque un mandataire était dans le jeu et ne respectait pas la loi, ou apparaissant lors de la saisine de la commission de conciliation, pour tous les baux donnant lieu à contentieux, établis de gré à gré ou par le ministère d'un agent immobilier. Les associations de consommateurs, en cela tout à fait dans leur rôle, ont également dénoncé à de multiples reprises le déséquilibre des contrats. Pour être clair, ces clauses, allant du contestable au scandaleux, empoisonnaient les relations locatives. Il était temps de lutter contre elles a priori, et non seulement a posteriori par le contrôle et la sanction.
Étaient-elles davantage le fait des particuliers qui louent et gèrent eux-mêmes, ou des professionnels ? On peut avancer sans se tromper que les particuliers pêchent par ignorance des dispositions en vigueur, quand les mandataires en ont une bonne connaissance. Les seconds savent aussi qu'ils engagent leur responsabilité pour le cas où le bail qu'ils ont proposé à la signature du locataire viendrait à être attaqué devant le juge. Cela dit, on a aussi vu la loi malmenée par des professionnels, et même par de grandes enseignes... Bref, il fallait normer les choses et l'heure n'est plus ni à l'attribution des responsabilités ni à la sanction des coupables.
L'heure est à la fin de la suspicion. Les relations locatives en seront apaisées. D'autant qu'au bail va devoir désormais être associé une notice décrivant les droits et obligations du locataire de façon didactique. Ce document, lui, n'est pas encore disponible et fera l'objet d'un texte règlementaire spécifique. En somme, une nouvelle ère des rapports entre bailleurs privés, mandataires et locataires s'ouvre peut-être. C'est quelque chose comme un progrès démocratique.
Henry Buzy-Cazaux
Président de l'Institut du Management des Services Immobiliers
Source: © Capital.fr